Le 29 novembre 2010 entre 07 h 40 et 08 h 00, deux scientifiques iraniens ont été l'objet d'attentats alors qu'ils se rendaient à l'université Shahid Beheshti pour y prodiguer leurs cours.
Le premier, le docteur Majid Shahriari, était dans une voiture conduite par un chauffeur/garde du corps en compagnie de son épouse. Une mine magnétique aurait été fixée sur le véhicule par deux motards à hauteur de la rue Artash. L'engin aurait explosé quelques secondes plus tard alors que les motocyclistes avaient pris le large.
Quelques minutes plus tard, le
même scénario allait se réaliser un peu plus au nord de l'université. Toutefois, le professeur Fereidoun Abassi-Davani se serait aperçu d'une manœuvre suspecte de motards. Après avoir arrêté sa voiture, il aurait alors évacué en catastrophe son véhicule et fait sortir son épouse. La bombe aurait explosé alors que le couple n'était encore qu'à deux mètres du véhicule. Heureusement, les deux victimes ne souffriraient que de blessures légères.Déjà, le 12 janvier 2010, Massoud Ali Mohammadi avait trouvé la mort devant chez lui par l'explosion d'une moto piégée. Physicien enseignant à l'université de Téhéran, il travaillait aussi au profit des Pasdaran. Lors de cette action, bien que les Iraniens aient désigné les coupables présumés, les « contre-révolutionnaires, les sionistes et les agents de l'« arrogance globale » », des chercheurs américains et britanniques avaient affirmé que Mohammadi s'occupait surtout de physique quantique, ce qui n'a pas de rapport avec la physique nucléaire.
Toutefois, il existe une coïncidence troublante : depuis 2008, Mohammadi et Shahriari participaient au projet Sésame patronné par l'UNESCO. Il prévoit le développement d'un accélérateur de particules qui devrait être construit en Jordanie. Plusieurs pays arabes ainsi qu'Israël font partie de ce projet.
Ces trois affaires ont un point commun : le professionnalisme indéniable des attaques. Dans les deux derniers attentats, des charges à effet dirigé ont été employées. Elles étaient destinées à tuer la cible en n'occasionnant que des dégâts collatéraux minimums. De plus, les charges devaient être de taille assez réduite pour pouvoir être emmenées discrètement à moto et collées aux véhicules visés. En janvier, le piégeage d'une motocyclette a semblé inhabituel en Iran. Une « première » en quelque sorte. Ces opérations ont toute nécessité des identifications précises des cibles et des repérages des lieux et du timing très approfondis.
Qui se trouve derrière ces attentats ?
Ali Akbar Salehi, le responsable du programme nucléaire iranien a déclaré : « ne jouez pas avec le feu car la patience du peuple iranien a des limites et, si elle prend fin, nos ennemis en subiront les conséquences ». Il a également affirmé que l'Iran allait « accélérer sa marche nucléaire ». Le président Ahmadinejad a pour sa part affirmé : « L'Iran a le droit d'enrichir de l'uranium et de produire du combustible et ce droit n'est pas négociable ». Il a par ailleurs accusé les pays occidentaux et Israël d'être derrière ces deux attentats.
Il est probable qu'il ne se trompe pas trop. En effet, le fait que ces attaques soient relativement simples sur le plan technique révèle que ce n'est pas le Mossad qui les a menées directement. En effet, le service israélien a toujours fait preuve d'un grand professionnalisme et surtout, d'une imagination débordante pour mener à bien ses opérations homo : téléphones qui explosent, intoxications diverses, appui tête de siège de voiture détonnants, etc. Michel Audiard, le célèbre dialoguiste français aujourd'hui disparu aurait pu dire d'eux qu'ils sont « joueurs ».
Les Engins explosifs improvisés (EEI) employés lors de ces trois attentats semblent plus être le fait de groupes d'opposition iraniens. Certes, ceux-ci ont reçu une formation de base prodiguée par des professionnels qui ont voulu faire dans le « simple, rustique, manœuvrier et efficace ».
Il est donc vraisemblable que ce soit un de ces groupes d'opposition aidés par des artificiers du Mossad qui se soit livré à ces actions. De plus, il est très difficile pour les services israéliens de monter une structure permanente en Iran car les services de sécurité de Téhéran sont à l'affût. Il est donc préférable de déléguer ces missions à des Iraniens de souche dont les motivations sont d'ordre politique. Les mouvements les plus puissants et les plus structurés dans la région de Téhéran sont les Moudjahiddines du peuple et les groupuscules royalistes. Curieux hasard, les intéressés clament haut et fort qu'en réalité ce sont les services iraniens qui se sont débarrassés d'individus dont la foi dans le régime était émoussée. Il semble évident que lorsque les services iraniens reçoivent l'ordre d'éliminer un traître réel ou supposé, ils ne se livrent pas à ce type de mise en scène. L'impétrant disparaît et c'est tout.
La guerre des services secrets se poursuit donc pour tenter d'enrayer l'effort militaire nucléaire iranien. Le pouvoir a reconnu officiellement que plusieurs centrifugeuses produisant de l'uranium enrichi sur le site de Natanz avaient été mises « hors service » par des « logiciels installés sur des équipements électroniques ». Pour l'AIEA, ce sont toutes les centrifugeuses de Natanz qui ont été arrêtées au moins 24 heures en novembre. Le virus Stuxnet n'est vraisemblablement pas étranger à cette panne.
En 2007, c'est la centrale de Busher qui a connu d'importantes difficultés techniques dont l'explosion causée par des transformateurs électriques.
En janvier 2007, Ardeshir Hassanpour, un scientifique qui travaillait sur le site d'Isfahan est décédé suite à un « empoisonnement au gaz[1] ».
A l'heure où une intervention directe d'Israël contre les sites nucléaires iraniens ne semble plus être d'actualité si l'on en croit les révélations de Wikileaks, le seul moyen de ralentir la progression de Téhéran vers la bombe semble bien être la guerre secrète.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire